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6 octobre 2010 3 06 /10 /octobre /2010 22:10

http://www.un-echo-israel.net/Une-grande-amitie

Dès le début de la 1ère Guerre mondiale, il fut l’un des inspirateurs du mouvement Nili, acronyme hébreu de : “La Gloire d’Israël ne ment pas” [I Samuel 15.29]. Cette organisation offrait des services de renseignements à l’armée britannique au moment où elle se préparait à envahir la Palestine qui croupissait sous le joug de l’Empire ottoman. Pour ce faire, des messages étaient transmis par chaloupe à une unité de la Royal Navy, venue au rendez-vous au large d’Atlit. Mais, à un moment donné, les Anglais cessèrent de coopérer.

Bravant le destin, Avshalom se décida à partir avec un compagnon vers les lignes anglaises qui s’étaient stabilisées aux environs d’El-Arish, pour rétablir le contact avec l’armée tant attendue. Malheureusement, arrivés au sud de la bande de Gaza, aux environs de Rafiah, ils furent interceptés par une bande de Bédouins, en janvier 1917. Blessé mortellement, Avshalom demanda à son camarade de retourner vers le nord pour rapporter aux siens la triste nouvelle qui ne fut pas sans causer de consternation dans tout le Yishouv, autrement dit, dans la communauté juive du pays.

Comme il est bon de laisser du temps au temps, les tenants et les aboutissants du drame furent finalement éclairés de façon inattendue en 1967. Au moment où l’armée israélienne installait un poste d’observation à Rafiah, après la Guerre des six jours, l’un des officiers du camp ne manqua pas d’être intrigué par la présence insolite, dans ce secteur, d’un palmier situé à l’écart. Mais l’un des Bédouins d’une tribu avoisinante, témoin des événements de 1917, le rassura en lui disant : “C’est le palmier du Juif !”. Et d’expliquer que l’homme, enterré là, avait en poche des dattes d’où avait jailli cet arbre isolé. Des examens appropriés confirmèrent qu’il s’agissait bien du corps d’Avshalom qui, dans la fièvre de la victoire, fut en quelque sorte introduit au panthéon national.

Un maître à penser

L’auteur de cette biographie décrit, avec force détails, la vie d’Avshalom à Paris où il était venu pour des motifs d’étude. Sans s’attarder sur les rencontres, pour le moins étonnantes, avec des célébrités telles que Marcel Proust et André Gide, dans un café où ils avaient leurs habitudes, on se limitera ici à réajuster l’idée un peu romancée que l’auteur semble se faire du couple Maritain. Reconnu en Europe et aux Amériques comme le représentant le plus éminent de la pensée catholique au 20ème siècle, J.M. [1882-1973] fut, par ses engagements les plus variés, constamment présent aux grands débats de son temps. Traduit en plusieurs langues, son maître livre Humanisme intégral, a jeté les bases d’une nouvelle chrétienté, non plus ’sacrale’ comme au Moyen-Age, mais ’profane’ et ouverte aux valeurs du monde moderne. Le jour de sa mort, son ami, le pape Paul VI, dira de lui : “Il fut un maître dans l’art de penser, de vivre, de prier”. A cet égard, une anecdote survenue durant la visite de ce pape en Inde ne manque pas d’être éclairante. En effet, au cours d’un entretien particulier avec le Président Shastri, Paul VI fut ému de l’entendre dire en toute simplicité : “Mon maître à penser, c’est Jacques Maritain !”, car il aurait pu faire le même aveu.

Emportée, semble-t-il, par l’effluve d’une imagination créatrice, le biographe d’Avshalom s’étend complaisamment sur le cadre soi-disant bourgeois de la vie des Maritain à cette époque. L’on sait pourtant que le jeune ménage vivait de façon assez austère, si bien que, chez J.M., le côté bourgeois appartenait plutôt à son ascendance. Son grand-père maternel était, en effet, Jules Favre dont l’opposition à Napoléon III avait été notoire. Il devint ministre des Affaires étrangères en 1870 dans le gouvernement de la Défense nationale et fut contraint, à la suite des défaites françaises, de consentir à la capitulation de Paris, puis à un armistice humiliant en janvier 1871.

Dans l’exercice de ses fonctions, il reçut le Chancelier Otto Von Bismark dans sa résidence privée à Versailles, pour finaliser les conditions de l’évacuation du territoire français. Un Rothschild représentait la France dans les négociations de l’indemnité de guerre exigée par la Prusse dont les banquiers étaient Mendelsohn et Bleichröder. Effrayé des cinq milliards de francs or exigés par la Prusse, Jules Favre essaya d’amadouer son hôte en arguant : “Même si quelqu’un voulait compter depuis la naissance du Christ, il n’arriverait pas à une somme si énorme !” Ce à quoi, le ’Chancelier de fer’ répliqua froidement : “C’est pour cela que nous avons avec nous Bleichröder, il compte depuis la naissance du monde !”

Peu après la Première guerre mondiale, la maison des Maritain, à Meudon, devint un pôle d’attraction où affluaient les personnalités les plus en vue du monde des Lettres et des Arts. Dans un style empreint d’une modestie touchante, Raïssa nous a laissé, dans Les grandes amitiés, un écho des heures stellaires de ce qui fut alors un haut-lieu de l’esprit. On signalera à ce sujet que ces souvenirs ne furent rédigés que pour répondre aux instances réitérées de son entourage et en particulier du philosophe thomiste Etienne Gilson.

En dépit de ses sympathies de jeunesse pour l’Action française, J .M. se désolidarisa de cette idéologie dont les options devenaient inquiétantes. Prônant un “nationalisme intégral”, elle se signalait par des attitudes outrancières comme en témoigne l’un de ses mots d’ordre : “La violence au service de la raison l” Sans omettre de rappeler les tendances antisémites de cette formation bourgeoise, le philosophe se justifia, après la condamnation du mouvement par Rome, en publiant Primauté du spirituel qui eut un grand retentissement dans la conscience nationale.

Etant donné ses prises de position face au déferlement du Nazisme, outre-Rhin, il n’est pas surprenant que, suite à l’occupation de la zone nord du pays, l’une des premières démarches de la Gestapo fut de contacter l’Institut Catholique de Paris pour demander où se trouvait le professeur de philosophie. Comme il était déjà en tournée de conférences au Canada, il souhaita revenir en France pour être présent aux souffrances des siens, mais son disciple et ami, l’abbé Charles Journet – devenu par la suite, Cardinal – lui téléphona pour lui déclarer sans ambages : “Je vous donne l’ordre de rester là où vous êtes !

Il serait superflu de préciser qu’il rompit dès le début avec l’ambiance méphitique du régime de Vichy, dont l’administration fut un refuge des plus accueillants pour les membres de l’Action française. Dès sa première rencontre avec le Maréchal, Charles Maurras, l’inspirateur de ce parti réactionnaire, avait du reste salué sa venue au pouvoir comme “une divine surprise”. Cet agnostique en profitait pour souffler à l’oreille du Chef de l’Etat le secret d’une monarchie sans roi et d’une Eglise sans foi.

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Jacques Maritain et Marc Chagall

Durant la guerre, l’appartement des Maritain à New York, devint un havre de paix où aboutissaient bien des victimes de la ’Nouvelle Idée’ un titre dont le parti nazi aimait à s’affubler. L’historien de l’art, Focillon, le prix Nobel Sigrit Undset, Chagall, Elizabeth de Miribel, secrétaire du chef de la France Libre, et bien d’autres encore vinrent se ressourcer à cet endroit. De là, partirent aussi les nombreuses demandes de visa que son prestige lui permettait de faire en faveur des intellectuels juifs qui cherchaient désespérément le moyen de quitter un continent devenu inhospitalier.

L’exilé volontaire évoquera pus tard le climat oppressif de cette époque. “Années de New York, où assiégés par le désespoir tandis que la croix gammée triomphait en Europe, il fallait quand même soutenir les cœurs (et c’est alors que Raïssa a connu la blessure la plus cruelle, la brûlure de l’esprit à la vue de l’agonie des opprimés et des persécutés, et de l’horreur d’un monde que Dieu semblait abandonner).”

Le manifeste qu’il publia peu après la défaite de 1940 : A travers le désastre avait eu un tel impact sur les premiers volontaires de la Résistance qu’on lui demanda d’institutionnaliser son aide aux partisans de la France libre. Ainsi commença la longue série des messages que Radio Londres diffusait chaque semaine dans cadre de l’émission Les Français parlent aux Français où André Gallois et Jean Marin veillaient à entretenir la flamme. C’était l’un des moments forts de ces émissions annoncées par le motif initial – Le destin frappe à la porte ¬de la cinquième Symphonie de Beethoven. Désignant en morse, la lettre ’V’, le signal Pan-pan-pan-pam entendait rappeler à l’adversaire – dans sa langue à lui - qu’il n’était pas le seul à songer à la Victoire.

On ne saurait s’étonner, qu’avec de tels états de service, le pays allait une fois de plus faire appel à lui en lui demandant d’assumer, de 1945 à 1948, le poste d’ambassadeur de France près le Saint Siège. “Je suis rentré, disait-il, à New York le 1er janvier 1945, n’ayant pas réussi à faire renoncer le général de Gaulle et G.B., alors ministre des Affaires Etrangères, à leur projet de me nommer ambassadeur au Vatican. L’acceptation à laquelle j’avais été moralement contraint par leur insistance, et par le sentiment que je ne pouvais me dérober à une tâche demandée au nom du pays encore en guerre m’avait réduit à une sorte de désespoir.

Un témoin fidèle [...]

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