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17 juin 2011 5 17 /06 /juin /2011 08:56

APPelFELD.jpgLe récit d'un jeune garçon déporté : comment se réadapter, continuer et espérer après l'indicible.

La voix d'Aharon Appelfeld est la plus poignante de la littérature israélienne. Hantée par la Shoah et par l'exil, cette voix-là ne cesse de faire revivre les heures les plus ténébreuses de l'histoire du XXe siècle. "Dépossédé et déraciné, il est l'auteur dépaysé d'une littérature elle-même dépaysée et il a fait de cette expérience un sujet qui n'appartient qu'à lui", a dit Philip Roth à propos d'Appelfeld, dont plusieurs romans décrivent son enfance cauchemardesque : né en 1932 en Bucovine, le jeune Aharon fut déporté dans un camp de concentration roumain dont il s'évada à l'âge de 13 ans avant d'être recueilli par l'Armée rouge, de traverser l'Europe avec un convoi d'orphelins et de débarquer en Palestine. 

C'est cette période de sa vie qu'évoque Appelfeld dans Le garçon qui voulait dormir. Erwin, son jeune narrateur, a 17 ans. Il vient d'arriver en camion dans un camp de réfugiés, près de Naples. Encore traumatisé par ce qu'il a enduré, il s'accroche au sommeil "avec une force phénoménale", en espérant pouvoir oublier ses souffrances et la mort de ses parents. Et malgré son extrême fragilité, il suit un entraînement physique intense sous les ordres d'Efraïm, un émissaire de l'Agence juive grâce auquel il s'initie aussi à l'hébreu, avant de monter sur un bateau et de se retrouver dans une ferme, au coeur des montagnes de Judée. 

"Parler hébreu était une obligation et, ainsi, nous serions en mesure de faire le lien entre la langue et la terre", dit Erwin, qui raconte ensuite sa très périlleuse adaptation dans un monde inconnu où il devra apprendre à s'enraciner, tout en lisant très intensément la Bible et en rêvant de devenir écrivain, comme son père, afin de "le ramener à la vie et de lui rendre la parole". Avec ce récit autobiographique, Appelfeld - Prix Médicis étranger en 2004 - signe une parabole magnifique sur l'exode, sur les tourments d'une enfance sacrifiée et sur les pouvoirs rédempteurs de la langue, lorsqu'elle devient le miraculeux instrument d'une renaissance. 

 

André Clavel (Lire)

 

http://www.lexpress.fr/culture/livre/revivre-a-17-ans-apres-la-deportation_1002612.html

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